Heimat, la trattoria contemporaine par Pierre Jancou !
Un restaurateur atypique
Pierre Jancou se serait-il embourgeoisé ? On avait laissé ce personnage atypique de la gastronomie parisienne au look de gavroche rue des Petites Écuries, dans le très bobo Xème arrodissement avec Vivant Table et Vivant Cave, et voici qu'aujourd'hui, on le retrouve avec une barbe fournie façon hipster dans le quartier du Palais-Royal, à deux pas du Grand Véfour, avec sa nouvelle adresse baptisée Heimat, un terme germanique qu'on pourrait traduire par "son chez soi". Zurichois d'origine, ce chef/restaurateur/dénicheur de produits d'excellence a sillonné la France, la Suisse et l'Italie pour se former auprès de grands chefs comme Massimo Bottura ou Alain Passard avant de s'installer à Paris en ouvrant successivement des tables à succès : La Crémerie (2001), Racines (2007) et Vivant en avril 2011, devenu Vivant Table en septembre 2012, auquel s'est ajouté fin 2012, sur le même trottoir, Vivant Cave avec ses vins nature et ses petits plats aux influences italiennes.
Un créateur d'atmosphère
Avec Heimat, Jancou confirme que ce qu'il aime par-dessus tout, c'est initier un nouveau projet et le faire grandir avant de passer de guerre lasse à une autre aventure. Mais attention, c'est la passion qui l'anime pas le business, grâce à une certaine vision de la restauration où le créateur d'atmosphère qu'il est, rencontre le passionné des produits et artisans autour d'une cuisine audacieuse, fine et brute à la fois. Le lien est ainsi fait entre des lieux originaux, empreints d'histoire et de tradition - comme l'ancienne crémerie de 1880 qui abritait La Crémerie ou encore une ancienne oisellerie du début du XXème pour Vivant Table - et une cuisine authentique et épurée qui se met au service des produits, sans les dénaturer avec une touche d'originalité.
Heimat, une trattoria contemporaine
Cette philosophie est une nouvelle fois au cœur de Heimat, qui s'est installé dans le sous-sol d'un ancien hôtel particulier qui fut la dernière demeure de Molière et qui abrite depuis l'automne 2013 Le Molière, un espace dédié à l’événementiel (attention, l'entrée de Heimat se fait par la rue Montpensier). Le lieu accueille 3 salles (avec une cinquantaine de couverts) et un espace bar dans un esprit de cave voutée. C'est épuré et brut avec l'omniprésence de la pierre et la simplicité des tables et chaises en bois dans la lignée de la cuisine bistrotière contemporaine façon trattoria franco-scandinave qu'il propose. Si Jancou intervient en salle et derrière le comptoir, il a confié la cuisine à Michele Farnesi, un jeune chef italien de 26 ans passé chez l'italien Massimo Bottura (Osteria Francescana*** à Modène) avant d'être le second de Giovanni Passerini (Rino) puis de Jean-François Piège (Thoumieux).
L'accueil & le service
L'accueil est agréable et sympathique. Si concernant le service, les débuts sont souvent un peu tâtonnants, il s'est révélé ici sérieux et décontracté. Si au départ, j'ai craint une certaine longueur dans le tempo des plats (le 1er a été servi au bout de 45 mn), tout est rentré dans l'ordre avec une vingtaine de minute d'intervalle entre chaque service.
Au menu
Dans ses précédents projets, notamment Vivant Table, Pierre Jancou s'entendait souvent dire que les tarifs étaient un peu excessifs (notamment avec son menu unique le soir à 60€ pour 7 services dont 2 amuses-bouches, là où de nombreuses tables parisiennes boxant dans la même catégorie proposent plutôt des additions autour des 40€/50€). Alors que les quelques informations qui avaient filtrées sur Heimat laissaient penser qu'un effort serait fait sur la douloureuse (avec notamment un menu diner en 5 services annoncé à 45€), il s'avère que le menu du soir affiche finalement un tarif de 55€ ! Pour déjeuner, c'est plus raisonnable avec des formules entrée/plat ou plat/dessert à 26€ et 34€ pour le triptyque entrée/plat/dessert, axées autour d'une cuisine de marché. Concernant les vins, Jancou continue de proposer une sélection de vins français et italiens en grande partie naturels ou bios dont il fut le précurseur à l'époque de Racines.
Retour sur un dîner en photos (menu unique à 55€ pour 5 plats)...
En amuse-bouche, une focaccia maison croustillante et moelleuse recouverte d'une fine tranche de lard de colonatta et de quelques herbes. ya comme un goût de trop peu ! Il faudrait presque qu'elle soit servie à la place du pain qui était quant à lui un tantinet caoutchouteux à mon goût !
Tortellini de queue de boeuf, bouillon de poireaux et coques. Savoureux tortellini avec une association terre/mer qui tombe juste. Le bouillon est essentiel car c'est lui qui apporte l'assaisonnement, un peps revigorant et du caractère avec ses notes légèrement fumées. Très agréable !
Lotte, cime di rapa (sorte de brocoli sauvage typiquement méditerranéen), purée de céleri rave et crème de cédrat. Le cime di rapa offre des notes végétales intéressantes qui évoluent en belle harmonie avec le céleri rave et la lotte (un chouillat trop cuite à mon goût). Là encore un élément, la crème de cédrat, apporte une énergie salvatrice qui titille les papilles avec son acidité et ses saveurs d'agrume.
Pour accompagner mon dîner, je suis parti sur un verre de vin du Mâconnais de Gilles et Catherine Vergé, la Cuvée "Le Balaise" (100 % Chardonnay), un vin minéral à la belle palette aromatique commercialisé sous l'appellation Vin de table de France en raison de différents avec les organismes certificateurs alors que les vignes sont sur l’aire Mâcon Villages !
Spaghetti, oursin et combava. Une cuisson parfaite des pâtes maison alors que la crème d'oursin et combava offre une puissance iodée et citronnée très singulière, que certains palais pourront trouver trop marquée !
Canette, crème d'algue, betteraves fumées et endives (crues, braisée et légèrement brûlées). Belle cuisson de la canette pour ce plat assez rustique qui prend son envol avec les notes végétalo-terreuses et le fumé-brûlé de la betterave et des endives, sans oublier la crème d'algue et le jus de betterave.
Poire, lemon curl, bergamotte, amandes fraîches et marjolaine. Un final sucré simple mais terriblement efficace avec de magnifiques parfums et une variation de textures intéressante.
J'ai aimé
- Une déco et une ambiance qui tranche avec les cadres plutôt froids des tables évoluant dans la même catégorie..
- Une cuisine de produit audacieuse aux saveurs bien marquées.
- Une offre pour déjeuner qui devrait ravir une clientèle de bureau pour midi.
J'ai moins aimé
- Un tarif pour le menu du soir qui reste un peu élevé. Mais qui sait... peut-être qu'un choix additionnel sera proposé prochainement !
Infos pratiques
Heimat
37 rue de Montpensier - 75001 Paris
Tel : 0140267825
Ouvert tous les jours sauf le samedi et dimanche de 12h à 14h30 et de 19h à 23h (réservation conseillée).